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{:fr}Aristide Maillol à l’honneur au Musée d’Orsay{:}{:en} Aristide Maillol honored at Orsay Museum{:}

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Depuis l’exposition organisée en 1961 au Musée d’art moderne à Paris pour le centenaire de sa naissance, Aristide Maillol n’avait pas bénéficié de véritable rétrospective. L’exposition Aristide Maillol (1861-1944). La quête de l’harmonie qui se tient au musée d’Orsay jusqu’au 21 août présente tous les aspects du travail de l’artiste, de ses débuts dans la peinture à son incursion dans le domaine de la sculpture qui devient son médium de prédilection après la Première Guerre mondiale et avec laquelle il s’impose comme l’un des plus grands artistes du XXème siècle.

Après les hommages rendus à l’artiste pour le centenaire de sa naissance en 1961, l’œuvre de Maillol s’intègre dans le paysage artistique, notamment avec l’installation de dix-huit sculptures dans le jardin du Carrousel en 1965 à l’initiative d’André Malraux et Dina Vierny. Maillol est reconnu pour son travail de sculpteur, « probablement le dernier des grands sculpteurs que la France ait produits durant les cent dernières années »[1], selon les mots de F. H. Lem, mais les autres aspects de son œuvre sont souvent mal connus du public. Si le titre de cette exposition, « la quête de l’harmonie », se réfère à la dernière sculpture réalisée par Maillol, inachevée (baptisée Harmonie suivant les conseils du critique John Reward, pour qui l’art de Maillol « respire le calme et l’harmonie »), c’est bien aux débuts de la carrière de l’artiste que l’exposition d’Orsay est consacrée.

Maillol se tourne tout d’abord vers la peinture. Mais comme beaucoup de ses contemporains, il s’essaie à toutes les techniques : la céramique, la broderie, la tapisserie, la gravure, la sculpture sur bois. Il s’installe à Paris en 1882, où il suit les cours de Jean-Léon Gérôme et Alexandre Cabanel. Après trois échecs, il rentre finalement à l’École nationale des Beaux-Arts en 1885, puis il travaille dans l’atelier de Jean-Paul Laurens. Son œuvre peint est fortement influencé par l’impressionnisme et l’œuvre de ses amis nabis, par Puvis de Chavanne qu’il admire. L’exposition s’ouvre sur les premières œuvres peintes par Maillol, le seul autoportrait qu’on lui connaisse, La couronne de fleurs conservé à Tokyo et qui n’a pas été présenté en France depuis près de trente ans, ou encore le Portrait de tante Lucie, où on perçoit l’influence de Puvis de Chavannes avec des couleurs plus mates et une composition simplifiée par rapport à ses premières œuvres.

Maillol s’est aussi illustré dans le domaine de la tapisserie, inspiré par ses visites aux Gobelins et au musée de Cluny, et notamment par la Dame à la Licorne. Il expose une première tapisserie en 1893 au Salon de la société nationale des Beaux-Arts, et ouvre à Banyuls un petit atelier de tissage avec plusieurs ouvrières, dont Clotilde qui deviendra sa femme. Ses débuts dans la tapisserie lui vaut la promotion de la mécène Hélène Bibesco qui lui commande deux compositions. Il poursuivra sa production de tapisseries jusqu’en 1904.

Il s’essaie également à la céramique, à la gravure sur bois, et à la sculpture sur bois. Aux alentours de 1895, Maillol se tourne vers la gouge et le ciseau. Il sculpte des statuettes dans le bois ou des bas-reliefs, notamment sur des rondins de bois non écorcé, qui rencontrent très vite un vif succès : La Source, présentée à Orsay, « est déjà supérieure, dans sa grasse cambrure, aux bois de Gauguin », peut-on lire en 1961 sous la plume d’un critique d’art.[2]

La sculpture sur bois représente pour Maillol une transition vers la sculpture en terre ou en pierre. La taille du bois était très laborieuse et en raison d’une grave inflammation oculaire en 1904, il se tourne peu à vers le modelage de la terre et du plâtre. Il produit alors nombre de statuettes en terre cuite comme Léda, en plâtre et en bronze, qui seront présentées par Ambroise Vollard à Paris à côté d’une dizaine de tapisseries, de reliefs, de céramiques.

C’est toute cette première partie de la carrière de l’artiste, peu connue, jusqu’aux premières commandes de sculptures après son succès au Salon d’automne de 1905 avec Méditerranée, qui est retracée dans l’exposition au Musée d’Orsay qui vise à rendre compte de la richesse de l’œuvre de Maillol au-delà de ses sculptures monumentales, qui sont aussi présentées en partie, jusqu’à La Rivière (1938-43). La redécouverte récente de trente-six carnets de dessins de l’artiste permet de porter un nouveau regard sur la genèse de certaines œuvres et de mieux comprendre la manière dont il travaillait.

L’œuvre de Maillol est marquée à la fois par son retour au classicisme et par une grande modernité ouvrant la voie d’un renouvellement de la sculpture au XXème siècle et au début du XXIème. L’exposition Maillol-Héritage présentée à la Galerie Dina Vierny organisée en écho à celle du Musée d’Orsay vise à mettre en valeur cet autre aspect de l’œuvre de l’artiste, par la mise en dialogue de ses sculptures avec des œuvres d’autres artistes tels que Raymond Duchamp-Villon, Henri Laurens, Alberto, Giacometti ou Wang Keping. Selon les mots du critique Waldemar-George,[3] « pour Maillol le nu n’est qu’un prétexte. Qu’il se serve d’un modèle ou d’une photographie, il transpose ces données dans l’idiome des plans et des volumes, dont les accords comptent plus selon lui qu’une vérité platement anatomique. Ses figures sont scandées comme des vers de douze pieds. » Maillol ouvre donc nouvelles perspectives dans le domaine de la sculpture, du néocubisme à l’abstraction, et il reste un phare pour nombre d’artistes de la fin du XXème et du début du XXIème siècle.

Aristide Maillol (1861-1944). La quête de l’harmonie
Musée d’Orsay, Paris : du 12 avril au 21 août 2022
Kunsthaus, Zurich : du 7 octobre 2022 au 22 janvier 2023
La Piscine– Musée d’art et d’industrie André Diligent, Roubaix : du 18 février – 21 mai 2023

Avec le soutien de la Fondation Dina Vierny – Musée Maillol.

Commissariat : Antoinette Le Normand-Romain – directrice générale honoraire de l’Institut National d’histoire de l’art, conservatrice générale honoraire du patrimoine – et Ophélie Ferlier-Bouat, conservatrice des sculptures au musée d’Orsay et directrice du Musée Bourdelle.


[1] F. H. Lem, « Hommage à Aristide Maillol », in Défense de l’Occident

[2] Raymond Charmet, « Maillol rappelle le principe des arts plastiques, l’admiration de l’homme pour le corps de la femme », in Arts, 28 juin 1961.

[3] Waldemar-George, « Maillol », in Combat, 2 octobre 1961.

Aristide Maillol, Profil de femme, circa 1896. Huile sur toile, 73,5 x 103 cm. Paris, musée d’Orsay. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.

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Since the exhibition held in 1961 at the Museum of Modern Art in Paris for the centenary of his birth, Aristide Maillol had not benefited from a real retrospective. The exhibition Aristide Maillol (1861-1944). The Quest for Harmony, which is being held at the Musée d’Orsay until August 21, presents all aspects of the artist’s work, from his early painting to his foray into sculpture, which became his preferred medium after the First World War and with which he established himself as one of the greatest artists of the 20th century.

After the tributes paid to the artist for the centenary of his birth in 1961, Maillol’s work became part of the artistic landscape, particularly with the installation of eighteen sculptures in the Carrousel garden in 1965 on the initiative of André Malraux and Dina Vierny. Maillol is known for his work as a sculptor, « probably the last of the great sculptors that France has produced in the last hundred years, »[1] in the words of F. H. Lem, but the other aspects of his work are often poorly known to the public. If the title of this exhibition, « The Quest for Harmony », refers to the last sculpture created by Maillol, unfinished (called Harmony following the advice of the critic John Reward, for whom Maillol’s art « breathes calm and harmony »), it is indeed the beginnings of the artist’s career that the Orsay exhibition is devoted to.

Maillol first turned to painting. But like many of his contemporaries, he tried his hand at all techniques: ceramics, embroidery, tapestry, engraving, and woodcarving. He moved to Paris in 1882, where he studied under Jean-Léon Gérôme and Alexandre Cabanel. After three failures, he finally entered the National School of Fine Arts in 1885, then worked in the studio of Jean-Paul Laurens. His paintings are strongly influenced by Impressionism and the work of his Nabis friends, including Puvis de Chavanne, whom he admired. The exhibition opens with the first works painted by Maillol, the only self-portrait known to him, The Crown of Flowers preserved in Tokyo and which has not been presented in France for nearly thirty years, or the Portrait of Aunt Lucie, where we see the influence of Puvis de Chavannes with more matte colors and a simplified composition compared to his early works.

Maillol also became famous in the field of tapestry, inspired by his visits to the Gobelins and the Cluny Museum, and particularly by the Lady of the Unicorn. He exhibited his first tapestry in 1893 at the Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts, and opened a small weaving workshop in Banyuls with several workers, including Clotilde who was to become his wife. His beginnings in tapestry earned him the promotion of the patroness Hélène Bibesco who commissioned two compositions from him. He continued his tapestry production until 1904.

He also tried his hand at ceramics, wood engraving and woodcarving. Around 1895, Maillol turned to the gouge and the chisel. He sculpted statuettes in wood or bas-reliefs, notably on logs of unbarked wood, which quickly met with great success: La Source, presented at Orsay, « is already superior, in its fat camber, to Gauguin’s wood », as one art critic wrote in 1961. [2]

For Maillol, wood sculpture represented a transition to sculpture in clay or stone. Wood carving was very laborious and because of a serious eye inflammation in 1904, he turned to clay and plaster modeling. He then produced a number of terracotta statuettes such as Leda, in plaster and bronze, which were presented by Ambroise Vollard in Paris alongside a dozen tapestries, reliefs and ceramics.

It is this entire early part of the artist’s career, little known, up to the first commissions for sculptures after his success at the 1905 Salon d’automne with Méditerranée, that is retraced in the exhibition at the Musée d’Orsay, which aims to give an account of the richness of Maillol’s work beyond his monumental sculptures, which are also presented in part, up to The River (1938-43). The recent rediscovery of thirty-six of the artist’s sketchbooks allows us to take a new look at the genesis of certain works and to better understand the way he worked.

Maillol’s work is marked both by his return to classicism and by a great modernity opening the way to a renewal of sculpture in the twentieth and early twenty-first centuries. The exhibition Maillol-Héritage presented at the Galerie Dina Vierny, organised in parallel with the exhibition at the Musée d’Orsay, aims to highlight this other aspect of the artist’s work by placing his sculptures in dialogue with works by other artists such as Raymond Duchamp-Villon, Henri Laurens, Alberto, Giacometti or Wang Keping. In the words of the critic Waldemar-George,[3] « for Maillol the nude is only a pretext. Whether he uses a model or a photograph, he transposes these data into the idiom of plans and volumes, whose agreements count more for him than a flatly anatomical truth. His figures are scandalised like twelve-foot verses ». Maillol thus opened up new perspectives in the field of sculpture, from neocubism to abstraction, and he remains a beacon for many artists of the late 20th and early 21st centuries.

Aristide Maillol (1861-1944). The Quest for Harmony
Musée d’Orsay, Paris: from April 12 to August 21, 2022
Kunsthaus, Zurich: from October 7, 2022 to January 22, 2023
La Piscine- Musée d’art et d’industrie André Diligent, Roubaix: from February 18 to May 21, 2023

With the support of the Fondation Dina Vierny – Musée Maillol.

Curator: Antoinette Le Normand-Romain – honorary director general of the Institut National d’histoire de l’art, honorary general heritage curator – and Ophélie Ferlier-Bouat, curator of sculptures at the Musée d’Orsay and director of the Musée Bourdelle.


[1] F. H. Lem, « Hommage à Aristide Maillol », in Défense de l’Occident

[2] Raymond Charmet, « Maillol rappelle le principe des arts plastiques, l’admiration de l’homme pour le corps de la femme », in Arts, June 28, 1961.

[3] Waldemar-George, « Maillol, » in Combat, October 2, 1961.

Aristide Maillol, Profile of a Woman, circa 1896. Oil on canvas, 73.5 x 103 cm. Paris, Musée d’Orsay © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.

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